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Medias-Quatre femmes rédactrices en chef I Une avancée mais rien n’est encore vraiment gagné

Medias-Quatre femmes rédactrices en chef I Une avancée mais rien n’est encore vraiment gagné

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Avec l’élection, samedi dernier, d’Abouhariat Saïd Abdallah à la tête de la rédaction d’Al-watwan, ce sont, en tout, quatre femmes qui sont désormais à la tête des rédactions dans le pays. En effet, Moinadjoumoi Papa Ali (Ortc), Rabiata Abdallah (Ortn), Tahamida Mze (HaYba Fm) et donc Abouhariat Saïd Abdallah (Al-watwan) sont toutes les patronnes de ces rédactions. Une situation inédite dans le pays, car si auparavant d’autres femmes ont été aux commandes de grandes rédactions de médias de la place, jamais elles n’ont été aussi nombreuses au même moment. Ces arrivées à la tête des rédactions de ces médias est-elle donc synonyme d’une vraie prise de pouvoir ? Comment cette nouvelle donne est perçue par les anciens et actuels acteurs du secteur ? Quelle lecture faire de cette situation ? Qu’en pensent leurs collègues masculins ? Eléments de réponse…

 

Pour certains, il s’agit d’une prise de pouvoir, tandis que pour d’autres c’est l’arbre qui cache la forêt et on en serait encore loin de cette «féminisation» de la presse. Seulement, il ne s’agit pas d’une nouveauté en soi puisqu’avant il y a eu d’autres femmes qui ont dirigé des rédactions. C’est ce que disent d’ailleurs toutes les personnes interrogées. Ahmed Ali Amir, coordinateur de la communication à Beit-Salam appelle cela «normalité».

«Il y a de plus en plus de femmes qui ont choisi le métier de journaliste. Normal qu’elles accèdent à des postes de responsabilité éditoriale. À Al-watwan nous avions eu Saminya et Faïza qui ont assumé avec brio le poste de rédacteur en chef. Ce n’est donc pas nouveau». Ali Moindjié aujourd’hui conseiller au Conseil national de la presse et de l’audiovisuel, partage cet avis «on a eu par le passé des femmes qui ont assumé des responsabilités éditoriales dans les médias. Saminya Bounou à Al-watwan, Faouzia Ali Amir à l’Ortc, Ramlati Ben Ali à l’Ortc à Al-fajr Ndzuani et à la Rtn». Passé ce constat, l’intéressé se montre aussi dubitatif quant à ce «changement». En effet, Ali Moindjié affirme que cette nouvelle donne n’est pas systématiquement synonyme de changement des mentalités.

Les changements doivent être portés par tous

«Il persiste de graves problèmes du genre dans notre pays qui exigent un véritable engagement collectif. Il est si profond qu’on ne peut raisonnablement s’attendre à ce que les quelques femmes promues puissent les régler à elles seules», déclare Ali Moindjié avant d’ajouter qu’il «règne une certaine confusion des rôles dans les médias. Beaucoup pensent encore, à tort, que le rédacteur en chef est un auxiliaire du directeur et que ce dernier serait in fine le chef de la rédaction. C’est encore plus préoccupant dans les médias d’Etat dont les directeurs estiment devoir assurer la communication du parti au pouvoir». «Je salue la promotion de ces femmes comme autant de progrès, mais en même temps je dis que les changements doivent être portés par tous les acteurs et pas seulement les femmes promues».

 


Mohamed Hassane, conseiller en communication à la Société comorienne des hydrocarbures, estime lui qu’il «est très tôt pour dire que le mal est derrière nous, pour crier victoire. Ce n’est pas quelque chose d’encore bien assis. Ces femmes arrivent à la tête des rédactions sans combat. C’est plutôt un simple concours de circonstances. Abouhariat, pour l’exemple, n’avait pas de concurrent(e). Saminya était, elle aussi, candidate unique. Si je puis me permettre le mot, en dépit de ces femmes à la tête des rédactions que vous avez citées, ce n’est pas encore la révolution. Gardons-nous de tout triomphalisme. Rien n’est encore fait même si l’on peut dire que c’est mieux aujourd’hui plus qu’hier». Abdallah Mgueni Faraenti, ancienne présentatrice de l’Ortc aujourd’hui assistante administrative aux Etats-Unis, souligne que la réalité est toute autre. Pour elle «cette responsabilité n’est qu’une chimère. Mais il reste à ces rédactrices en chef de s’imposer. Elles sont en droit de laisser leurs empreintes. Et je sais qu’elles vont le faire». C’est aussi ce que dit Houmi Ahamed-Mikidache, journaliste et directrice du média Era environnement. Pour elle, «il y a encore un long chemin à parcourir. Mais, on ne va pas se mentir: voir des femmes à ce niveau c’est une avancée aux Comores».


Pour autant, «il faut aussi que ces femmes marquent l’histoire par des actions concrètes en lien avec la condition des femmes aux Comores. Il y a aussi un autre élément à prendre en compte: le salaire. Sont-elles aussi bien payées que les hommes ?» Aussi, «en ce qui concerne Tahamida Mze, je ne comprends pas son statut...parce que celui qui parle c’est le co-directeur. Il n’y a en fait que deux médias publics où les femmes sont visibles. Mais ce n’est pas représentatif», poursuit-elle.

 

«Nous, avec Era Environnement nous avons voulu, montrer qu’un média privé peut faire ressortir le travail des femmes... je pense que c’est en intégrant plus de femmes dans les médias tenus par des femmes et des hommes que nous pourrons avancer. Il faut donc encourager les femmes à briguer des postes à hautes responsabilités et à diriger des médias, sans que les hommes soient aux manettes. J’ajoute que les femmes journalistes ne doivent pas être regardées uniquement comme des femmes: leurs compétences doivent faire la différence», ajoute Houmi Ahamed-Mikidache. Et sur ce volet, «je trouve que les femmes sont à la fois rigoureuses et exigeantes.

 

Les femmes ont la particularité d’être vulnérables, victimes souvent de harcèlement de toutes sortes. Elles ont droit à une protection particulière». Abdallah Mgueni Faraenti, ancienne présentatrice de l’Ortc ajoutera elle que «les femmes comoriennes se sont réveillées depuis un moment. Elles occupent de plus en plus de postes de décisions. Elles ne sont pas là seulement pour applaudir. Elles font de plus en plus de longues études. Et probablement d’ici peu, la balance va s’inverser en faveur de la femme. Il y a plus de députés femmes qu’avant. Nous avons une gouverneure... Donc cette percée est une confirmation de la tendance actuelle. Ce n’est pas seulement la presse».

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