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Ali Soilihi Mtsashiwa I Entre héritage contesté et souvenirs intacts

Ali Soilihi Mtsashiwa I Entre héritage contesté et souvenirs intacts

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Quarante-sept ans après son assassinat, le souvenir d’Ali Soilihi Mtsashiwa, deuxième chef de l’Etat comorien, divise encore. Pour les uns, il fut un visionnaire patriote, réformateur audacieux et défenseur de la justice sociale. Pour d’autres, son autoritarisme a laissé des blessures profondes. Témoignages croisés de ceux qui ont vécu son régime, entre admiration et douleurs encore vives.

 

Abdoulgafour Matain, ancien membre du comité central

«Ali Soilihi était un homme audacieux, visionnaire et doté d’une grande éloquence. Il défendait avec conviction ses idéologies politiques et ses principes, et s’opposait fermement aux pratiques traditionnelles comme le Milanatsi et la sorcellerie. Son programme reposait sur huit axes majeurs, dont la lutte contre la pauvreté, l’autonomisation des femmes, la santé, l’environnement, la décentralisation et l’autosuffisance alimentaire. Il nationalisa les terres pour en faire des priorités de l’État. Dix ans plus tard, ses idées résonnaient encore à l’Onu. Hélas, son œuvre manque de continuité. Contrairement à d’autres pays, nous négligeons notre histoire révolutionnaire et ses grandes figures. »

Mroudjaé Ali Mohamed, retraité de l’administration

«Ali Soilihi était un nationaliste profondément attaché à sa patrie. Il croyait que le développement passait par un patriotisme sincère, à inculquer d’abord aux dirigeants puis à l’ensemble du peuple, sans distinction d’origine. Il valorisait la langue comorienne, luttait contre la sorcellerie et les dépenses coutumières inutiles. Son amour du pays transparaissait déjà dans son mémoire de fin d’études, où il esquissait un projet de développement. Durant ses deux années et quatre mois au pouvoir, il a sollicité les compétences d’intellectuels, même issus de partis opposés, pour servir la nation au-delà des clivages politiques. Sa vision continue d’inspirer. »

Maman Mzalendro, marchande


«Sous son régime, la répression fut omniprésente : arrestations arbitraires, tortures, usage brutal de la force. Vieillards, femmes, jeunes, nul n’était épargné. Ces violences ne doivent jamais être oubliées. L’application stricte de lois contraires à nos us et coutumes bouleversa la société. Il devenait interdit d’offrir des biens à ses proches ou d’aider les plus pauvres, des gestes pourtant ancrés dans nos traditions. Ces actes étaient criminalisés, sévèrement punis par la police, parfois contre leurs propres familles. Une telle pression étouffait les liens sociaux. Certes, le président portait des projets utiles, mais beaucoup gardent surtout en mémoire les souffrances engendrées par ses méthodes autoritaires. Même certains partisans du Mongozi reconnaissent ces dérives répressives qui ont marqué son mandat. »
Ibrahim Ahamada Koutoubou, ancien coordonnateur des préfets

«Ce qui m’a le plus marqué chez Ali Soilihi, c’est sa confiance inébranlable en lui-même et en ses idéaux, son impartialité, ainsi que son rejet du favoritisme et des abus de pouvoir. Il a instauré une justice sociale équitable, sans distinction de statut. Ayant moi-même été membre influent du comité central, j’ai expérimenté cette équité : sanctionné comme tout citoyen pour avoir abusé d’un privilège. Le Mongozi était un visionnaire, en avance sur des réformes importantes comme l’éducation ou la décentralisation. Il craignait l’impérialisme, conscient de mourir avant d’achever son projet d’émancipation et de transformation des mentalités.»

Mohamed Maanloumi, ancien jeune militant révolutionnaire

«Je garde un souvenir fort d’Ali Soilihi pour sa capacité à convaincre et à rester proche du peuple. En moins d’un mois, il a su faire adhérer une grande partie des Comoriens, surtout les jeunes, à sa vision patriote du développement. Il croyait fermement que la jeunesse était la clé de l’avenir. Ses réformes (assises des travailleurs, formation de la main-d’œuvre, refonte de l’éducation) portaient cet espoir. Sa gouvernance, d’abord déroutante, a fini par s’imposer. Nous étions jeunes, mais engagés. La discipline, les travaux populaires et l’effort collectif ont forgé en nous un esprit de responsabilité et de patriotisme. »

Youssouf Ali Djaé, ancien garde du corps d’Ali Soilihi

«Le président Ali Soilihi incarne, pour beaucoup de sa génération, le patriotisme et une volonté farouche de développement rapide du pays. Visionnaire, il avait élaboré un plan quinquennal pour sortir les Comores du sous-développement, affirmant qu’aucun Comorien n’aurait besoin de chercher du travail chez l’ancien colonisateur. Chaque vendredi, dans les camps militaires, il expliquait les devoirs citoyens et militaires. Convaincu de ses idéaux, il appelait à la confiance collective, conscient que ses doctrines risquaient d’être oubliées. Il prévoyait un avenir marqué par le néo-colonialisme si la souveraineté n’était pas défendue. Il croyait à l’enracinement de la bonne gouvernance et de l’intégrité.»

 

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