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La parole aux citoyens I Crise énergétique : Les nouvelles mesures du gouvernement convainquent-elles ?

La parole aux citoyens I Crise énergétique : Les nouvelles mesures du gouvernement convainquent-elles ?

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Face aux coupures d’électricité persistantes, le gouvernement mise sur une refonte de la Sonelec, un mix énergétique et l’acquisition de nouveaux équipements pour sortir de la crise. Ces annonces suscitent à la fois espoir et scepticisme. Entre doutes sur leur efficacité et attentes de résultats concrets, des acteurs économiques réagissent.

 

Hamidou Mhoma, opérateur économique Hamidou Mhoma.JPG


«Il est louable de vouloir recruter un directeur général «au mérite et sur la base d’un projet de redressement». Cependant, le profil informatique du candidat choisi peut laisser songeur.(Le nouveau directeur est aussi ingénieur en Génie électrique, Ndlr). Il est toutefois sage de lui accorder le bénéfice du doute et de lui souhaiter bonne chance dans cette tâche ardue. Quant à la mise en place du Conseil d’administration de la Sonelec, c’est aussi une initiative positive que nous encourageons pour l’ensemble des sociétés publiques. Cependant, il est regrettable de constater l’absence du secteur privé, qui est le plus impacté par la crise énergétique et qui en paie un lourd tribut.

Le secteur privé a besoin d’avoir un œil dans la politique énergétique du pays. Par ailleurs, l’idée de se tourner vers un mix énergétique, notamment avec le solaire, est pertinente et tendance. Cependant, il est crucial de maîtriser le thermique au préalable. Cette crise énergétique a révélé que la Sonelec n’est même pas capable d’assurer la maintenance préventive de ses installations, encore moins les réparations. 16 générateurs ont fonctionné sans révision et sont tombés tous en panne. Un plan de renforcement des capacités du personnel technique de la Sonelec est donc indispensable.


Il est vrai que les Comores sont un pays ensoleillé, ce qui rend l’énergie solaire attractive. Cependant, il ne faut pas négliger les périodes de pluie, qui sont inévitables dans un pays connaissant deux saisons. Les régions où sont installées les centrales solaires connaissent des délestages, même en journée. Il est donc essentiel de tirer les leçons de ces expériences et de ne pas considérer le mix énergétique comme la solution miracle à tous les problèmes.


Les mesures annoncées par le gouvernement sont certes des avancées, mais elles ne suffiront pas à résoudre la crise énergétique complexe que traversent les Comores. En dehors de cette stratégie axée sur les énergies renouvelables, il est temps de doter le pays d’une vraie centrale thermique et éviter l’achat répétitif des groupes électrogènes qui a toujours montré ses limites et son inefficacité.»

Faharate Mahamoud, vice-présidente du Mouvement des entreprises comoriennes (Modec) 


«Ces mesures sont encourageantes, mais il est encore trop tôt pour juger de leur efficacité. En effet, ce n’est pas la première fois qu’un nouveau directeur général est nommé. Aura-t-il réellement les moyens et la liberté de mettre en œuvre les réformes nécessaires ? Ce n’est pas non plus la première fois que des groupes électrogènes sont acquis. La question est donc de savoir si un entretien rigoureux sera assuré pour garantir leur durabilité. Quant à la transition vers les énergies renouvelables, elle est essentielle, mais dans quels délais et avec quelle stratégie pour couvrir l’ensemble de nos îles ? Nous espérons que les appels d’offres pour la mise en service de la centrale géothermique seront lancés rapidement.


S’agissant du conseil d’administration, l’administration y est fortement représentée, avec un seul siège pour les usagers. Une plus grande place pour le secteur privé aurait été souhaitable afin d’assurer une meilleure diversité et une gestion plus efficace. Nous espérons que toutes ces initiatives seront suivies d’actions concrètes et durables, pour offrir enfin une solution stable et pérenne à la crise énergétique que traverse le pays depuis des décennies.»

Irchad Abdallah, président du Modec 

«La seule solution pour résoudre le problème énergétique dans ce pays est de lutter contre la fraude. Celle-ci est d’abord interne, car, à tous les niveaux, les employés de la Sonelec fraudent. Ensuite, il existe des villes, des villages et même des régions entières qui ne paient pas l’électricité, avec la complicité de nombreux employés de cette société. Résultat : ceux qui paient le font aussi pour ceux qui ne le font pas. Par ailleurs, étant donné que le coût de production de l’électricité repose en grande partie sur les énergies fossiles (gazole ou essence), ces dernières sont fréquemment détournées par les employés. Il n’y a d’ailleurs pas que la population qui en profite : certains opérateurs sont également impliqués dans ces pratiques de détournement et de vol d’électricité.


Sans oublier les sociétés d’État et les administrations publiques, qui ne font jamais preuve d’économie d’énergie. Il suffit d’observer la Place de l’Indépendance : certains bureaux restent allumés tard dans la nuit alors que leurs occupants sont partis sans éteindre les lumières. Quid des climatiseurs ? Tout cela, alors que nous savons pertinemment que ces administrations sont les championnes des impayés.»

Fahmy Thabit, entrepreneur et ancien président de la Chambre de commerce d’industrie et d’agriculture des Comores 


«La crise énergétique que traverse actuellement le pays est inédite. Il faut remonter à 1997 pour trouver une situation similaire. Nous nous rappelons qu’en 1997, cette crise avait été fatale à plusieurs entreprises de l’époque et avait provoqué une crise économique aiguë. Face à cela, le gouvernement a décidé de mettre en place un conseil d’administration à la Sonelec. C’est une demande formulée à maintes reprises par le secteur privé, ce qui la rend salutaire, tout comme la procédure de recrutement du directeur général (du moins dans la forme...). Ayant travaillé dans la société à l’époque où elle s’appelait Cee, je peux dire que malheureusement cela ne suffira pas.


Combien de directeurs avons-nous vu se succéder dans cette société depuis les années 90 jusqu’à aujourd’hui ? Et même si un directeur est compétent, comment peut-il améliorer la situation avec les mêmes déficiences et contraintes (financières, techniques et managériales) ? Depuis la Sec, en passant par l’Eedc, la Cee et la Ma-Mwe, nous avons toujours reproduit le même schéma en espérant un résultat différent. Le problème est avant tout structurel, et il faut le résoudre en restructurant complètement la fourniture d’électricité aux Comores. Il est nécessaire de réorganiser entièrement la société en la scindant en deux entités : une société de production d’électricité et une société de transport et de distribution d’électricité, afin d’assurer la disponibilité de l’électricité sur l’ensemble du territoire.


L’État doit confier la production d’électricité à une société privée (ou semi-privée) avec un cahier des charges contraignant et un suivi rigoureux, afin d’éviter de reproduire les erreurs de l’expérience de privatisation de la Cee entre 1999 et 2002. L’État devra également atteindre ses objectifs de mix énergétique en confiant leur réalisation et leur gestion à une société privée reconnue, dont la seule mission sera de produire de l’électricité thermique, solaire et, plus tard, géothermique. Quant à la société de transport et de distribution d’électricité, elle devra rester étatique afin d’assurer un service public et de généraliser les raccordements au réseau.»

Saïd Hachim Abderemane Charifou, ancient directeur général de la Ma-Mwe 

 


«La nomination d’un directeur dénéral au mérite et sur la base d’un projet de redressement est une bonne chose mais j’ai envie de dire que cela devrait être la règle de base pour toutes les nominations. Encore faut-il que le processus ne soit pas biaisé par des considérations politiques. La loi exige que pour les établissements publics comme la Sonelec, un Conseil d’administration impulse et contrôle les actions du directeur général. Malheureusement, la plupart du temps ce conseil n’est pas établi mais quand bien même il le serait, il fonctionne comme une chambre d’enregistrement des actions du directeur général, moyennant jetons de présence.

Pour l’achat de groupes électrogènes, il faut que vous vous référiez à vos anciennes publications et voir combien de fois vous avez annoncé l’achat de nouveaux groupes pour la société d’électricité. Quelques années plus tard on se retrouve devant la même situation. Le solaire aidera à soulager les problèmes de production d’électricité mais ce n’est pas la solution magique pour la stabilité économique.

Pour moi, le secteur de l’électricité connaît plusieurs problèmes : recrutements non mérités et anarchiques, production, distribution, facturation, commercialisation et recouvrement. Et le dernier, et pour moi c’est le plus grave, c’est le problème du vol de l’électricité. Et c’est sur ce problème qu’il faut mettre le plus de moyens pour trouver une solution sinon on va rester dans le même cycle de renouvellement des outils de productions quelques années après sans que la Sonelec ait les moyens de les acheter. Et l’Etat sera toujours obligé de débourser les fonds en lieu et place la Sonelec.»

Sitti Djaouharia Chihabiddine, présidente de l’Opaco 


«On attend les retombées et de vraies réalisations pour s’en féliciter… Certes les dispositions prises sont prometteuses mais malheureusement, on nous a trop longtemps habitués à de fausses solutions, pour de vrais problèmes. De même, l’absence du secteur privé au conseil d’administration nous laisse perplexe, quand on sait que c’est nous qui payons le plus lourd tribut et qui devions être les premiers partenaires de l’Etat. Le problème de management pèse certainement dans les difficultés actuelles mais le vrai problème de fond réside dans le type de production de base … Chez nos voisins directs, il semble qu’il y a des centrales au fioul plus ou moins raffiné, qui assurent au moins 50% ou un peu plus de l’ensemble des besoins …chez nous, c’est des groupes électrogènes !

Il semble que tout le monde est à la mix énergétique comme on le projette ici, c’est une bonne chose …mais elle a ses limites en période de pluies !
D’après certains spécialistes, le coût de production avec les groupes utilisés ici, groupes dits de secours, type groupe de grand chantiers sous d’autres cieux, le coût de production donc dépasserait les 400 francs le kilowattheure…


Impossible de penser équilibrer les comptes de la société d’électricité avec de tels coûts de production, comme le préconisent injustement certaines institutions internationales, semble-t-il. Une subvention structurelle et conséquente est impérative en attendant de vrais investissements correctement orientés pour des moyens de production plus adaptés comme à une époque lointaine ici-même et chez nos voisins directs. Par ailleurs, comment escompter un quelconque développement avec une électricité facturée actuellement à 200 francs le Kwh aux consommateurs ?


À titre d’illustration, l’Ethiopie, qui est entrain de concurrencer la Chine sur le registre « usine du monde », l’Électricité tourne autour de l’équivalent de 4 francs le Kwh, soit 50 fois moins notre Tarif. L’Europe tourne autour de l’équivalent de 30 francs de notre monnaie. Un pays est à comparer avec d’autres pays, comment veut-on qu’on puisse un jour être concurrentiel par ces temps où notre pays adhère à l’Omc et s’ouvre à la concurrence mondiale ? Aucun développement ne pourrait être possible sans un coût facturé de l’électricité à moins de 50 francs, entre autres préalables ; il y en a plein d’autres biens sûrs. Pour rappel, on est à 200 francs ; on est très loin…»

 

 

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