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Pas un mois ne passe sans quâun bateau battant pavillon comorien ne soit pris la main dans le sac, en raison dâune pĂȘche illicite, trafics de drogues, dâhydrocarbures, transport illĂ©gal dâarmes de guerres entre autres.
Depuis le 06 janvier 2017, la section de la Cour des comptes sâest lancĂ©e dans un contrĂŽle exhaustif Ă la suite dâune saisine du gouvernement actuel. Le rapport remis aux autoritĂ©s est accablant, tant dans lâoctroi des licences que dans la gestion des recettes du pavillon.
Le gouvernement confie dâabord Ă Akram ShaĂŻkh, patron de LâUnion marine classification service Llc, la gestion du pavillon durant cinq ans (2007-2012). Ce dernier devrait selon toujours les articles 4 et 5 du contrat, versĂ© au compte TR0001 la moitiĂ© des recettes encaissĂ©es. Et sur 442 828 950 francs comoriens recouvrĂ©s durant les premiers quatre ans, elle nâaurait versĂ© que 134 025 100 de francs au lieu de 359 766 953fc.
ExceptĂ© quelques dĂ©penses justifiĂ©es en guise de contribution Ă lâOmi, de 2005 Ă 2009, la sociĂ©tĂ© a dĂ©pensĂ©, plus de soixante millions de francs comoriens pour satisfaire des dĂ©penses de certaines autoritĂ©s comoriennes. Cet argent aurait servi Ă payer des frais de voyage, lâachat de voiture mais aussi Ă acheter des ordinateurs, des Ă©quipements et consommables pour les dĂ©partements ministĂ©riels de la vice-prĂ©sidence en charge des Transports.
En 2007 par exemple, sur instruction du ministre des Finances, Mohamed Ali Soilihi, le prĂ©sident de lâunion maritime, a remis Ă Zoubert Ahmed Soufiane, ambassadeur des Comores Ă Abu Dhabi et Robert, son conseiller, la somme de 15 812 320 de francs pour lâachat de sa voiture, pouvait-on lire dans ce rapport.
Mais par magie il nây a pas le moindre document ordonnant Ă Akram de procĂ©der Ă ces virements ni une piĂšce des dĂ©penses payĂ©es. Il est donc demandĂ© Ă lâambassadeur et son conseiller de restituer cet argent. Se rĂ©fĂ©rant sur les chiffres mentionnĂ©s dans le rapport de la section des comptes, Akram Shaikh doit Ă lâEtat comorien, 52 072 900 de francs. Les rĂ©vĂ©lations similaires touchant de nombreux gestionnaires du pavillon abondent dans ce rapport.
Pas de traces des 118 millions de francs récoltés par Al-Fahim
La Cour a Ă©galement demandĂ© lâouverture dâune enquĂȘte pour le dĂ©tournement de 152 658 448 francs qui serait survenu en 2008. Une somme que le numĂ©ro 1 de lâUnion Marine Classification Services, a dĂ©boursĂ© en rĂ©ponse Ă une lettre du ministre des Finances pour payer des dĂ©penses sociales. Ces derniĂšres nâont jamais Ă©tĂ© justifiĂ©es ne serait-ce que la nature.
En 2014, la Direction des transports maritimes(Dtm), issue du ministĂšre des Transports a repris le flambeau. La gestion de ce dĂ©partement ministĂ©riel ne sera pas lâexception qui fait la rĂšgle. Au mois de juillet de la mĂȘme annĂ©e, le vice-prĂ©sident en charge des Finances et la ministre des Transports ont dĂ©cidĂ© dâaffecter des fonds de gestion pour assurer le fonctionnement du Dtm.
En deux ans, on a récolté 244 483 215 de francs dont 79 000 000 pour le fonctionnement de la structure. En épluchant les documents, la section a constaté la disparition de 90 742 881 de francs de reliquats.
LâAutoritĂ© nationale du transport (Ant) qui Ă©tait dirigĂ©e par un certain Essam Al-Fahim a quant Ă lui signĂ© un contrat en 2011. De 2012 Ă 2014 il a rĂ©coltĂ© 118 771 411 de francs. Il les a versĂ©s dans son compte personnel domiciliĂ© Ă DubaĂŻ au dĂ©triment du TrĂ©sor public. Comme toujours, la Cour nâa pas eu un seul justificatif de cet argent.
Eviter les gestions calamiteuses
La sociĂ©tĂ©Â grecque, international naval Surveys bureau S.A (Insb), et la vĂ©nĂ©zuĂ©lienne, la Venezuela Registrer Of Shipping (Vrs) Maritimes Services nâont pas laissĂ© de traces aussi en ce qui concerne leur gestion. La premiĂšre a dirigĂ© le pavillon durant sept ans (2000-2007) pendant que la deuxiĂšme avait le contrĂŽle du pavillon durant une pĂ©riode dâun an de 2014 Ă 2015.
Le 28 dĂ©cembre 2015, les dĂ©putĂ©s de lâUnion votaient la loi n°15-015/Au. Un texte marquant Ă la fois la crĂ©ation et la composition de lâAgence nationale des affaires maritimes (Anam), tout en lâattribuant en mĂȘme temps la gestion du pavillon comorien. Le rapport sorti le 24 de ce mois, qui concerne la gestion du pavillon comorien Ă lâinternational fait froid dans le dos.
Ce travail a en effet permis de lever le voile sur une gestion âcatastrophiqueâ durant la pĂ©riode de 2000 Ă 2015. Des sociĂ©tĂ©s Ă©trangĂšres et des dĂ©partements ministĂ©riels dĂ©lĂ©guĂ©s par le gouvernement comorien se sont dĂ©partagĂ©s la gestion dudit pavillon tel un gĂąteau.
Dans ce document dĂ©finitif de vingt-cinq pages dont Al-watwan a pu avoir une copie, la section des comptes a passĂ© au crible les mouvements financiers relatifs aux redevances recouvrĂ©es par ces sociĂ©tĂ©s devant ĂȘtre versĂ©es aux comptes domiciliĂ©s Ă la trĂ©sorerie publique et/ou Ă la Banque centrale. Lâobjectif de ce contrĂŽle a expliquĂ© un greffier de la Cour est dâĂ©viter la gestion calamiteuse du pavillon comorien.
200 bateaux enregistrés
Et ce en suivant les normes internationales. âNotre travail consiste Ă relever les mauvaises pratiques en faisant des observations. Nous avons remis nos rapports aux ministĂšres des Finances et des Transports. Ceux qui sont prĂ©sumĂ©s coupables dâune mauvaise gestion devront sâexpliquer devant les juridictions compĂ©tentesâ, a ajoutĂ© Me SaĂŻd Omar Nassur Charif.
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Pour le moment, la gestion revient Ă lâAnam. Celle-ci a, dans un premier temps, compris quâil faut trĂšs vite mettre les bouchĂ©es doubles pour redorer lâimage des Comores auprĂšs des organisations internationales comme lâOrganisation maritime internationale (Omi).
Les demandes adressĂ©es Ă lâAnam, pour enregistrement font dĂ©sormais lâobjet dâune Ă©tude minutieuse avant dâĂȘtre acceptĂ©es a fait savoir le directeur gĂ©nĂ©ral, SaĂŻd Salim. Parmi les critĂšres imposĂ©s aux bateaux voulant battre avec un pavillon comorien, il y a la reconnaissance internationale de la sociĂ©tĂ© en question, a ajoutĂ© notre interlocuteur mais aussi au niveau de lâOmi.
Exit les sociĂ©tĂ©s individuelles, a prĂ©cisĂ© notre interlocuteur. âNotre sociĂ©tĂ© est nĂ©e il y a un an et le travail qui nous attend est beaucoup plus dĂ©licat. Nous sommes en train de restructurer. On Ă©tait obligĂ© de procĂ©der au nettoyage de la liste des bateaux qui Ă©taient enregistrĂ©s au nom du pays au sein de lâOmi. Nous avons Ă©galement rĂ©siliĂ© les contrats de 11 bateaux de pĂȘches qui refusent de venir travailler dans les zones proches pour quâon puisse les contrĂŽler. On se doit dâĂȘtre prudent en respectant les conventions internationales. Il faut un suivi rĂ©gulier câest pour cela que nous formons des inspecteurs sur le domaine.â, a-t-il expliquĂ©.
InterrogĂ© sur le chiffre actuel des bateaux enregistrĂ©s sous le pavillon comorien, celui qui dit ignorer lâenvoi dâun rapport dans son ministre, Ă©voquera 200 bateaux. Selon lui, lâimportant, nâest pas avoir un nombre plĂ©thorique de bateaux mais de suivre les rĂšgles. Au moment oĂč nous Ă©crivions ces lignes, le ministĂšre des Transports disait ne pas avoir reçu le moindre rapport.
Abdou Moustoifa