Comme dans toutes les localités du pays, la ville de Moroni a célébré ce samedi 7 juin 2025 l’Aïd el-Adha dans une atmosphère de paix et de recueillement, loin des agitations du quotidien. Dès l’aube, les fidèles se sont rassemblés dans les différentes mosquées de la capitale pour accomplir la prière de l’Aïd, dans une tranquillité partagée et une joie palpable. Les rues de Moroni, habituellement animées par les bruits des voitures et des passants, ont vibré d’une autre énergie, empreinte de calme et de bienveillance. Fidèles à la tradition, les habitants ont honoré leurs défunts en se rendant dans les cimetières, multipliant les gestes de solidarité et partageant repas et douceurs dans un esprit de générosité.
Le sacrifice, la foi, la solidarité et le partage
Les visites aux tombes, moments forts de la journée, ont permis aux croyants de prier pour le repos des âmes disparues dans un élan de piété collective. Abdou Saandi, résident du quartier de Zilimadjuu, estime que la fête a été pleinement réussie cette année, tant sur le plan spirituel que social. Pour lui, l’Aïd el-Kabir est avant tout un moment de communion avec Dieu et de rapprochement entre croyants. «Nous avons passé une belle journée. Après la prière, nous avons chacun fait le tour des familles pour partager ces instants de joie », témoigne-t-il.
Il insiste sur la dimension religieuse de cette journée : «L’Aïd el-Kabir nous rappelle le sens du sacrifice, la foi d’Ibrahim [le prophète] et sa soumission à Allah. C’est une fête qui nous enseigne l’humilité, la gratitude et surtout la confiance envers notre Seigneur.» Et d’ajouter : «Nous devons nous interroger : sommes-nous capables, comme le prophète Ibrahim, de placer notre foi au-dessus de nos attachements matériels et affectifs?» Toutefois, certains estiment que l’Aïd el-Kabir ne suscite plus la même ferveur que l’Aïd el-Fitr. Assad Salim, habitant de Moroni Mdjivurize, partage ce sentiment : «On a l’impression que l’Aïd el-Kabir est de plus en plus négligée. Contrairement à l’Aïd el-Fitr, elle ne suscite pas le même enthousiasme. Pourtant, sa portée religieuse est tout aussi importante, sinon plus. Il faut redonner à cette fête la place qu’elle mérite dans nos cœurs et dans notre société.» Un avis partagé par Abdou Malik, taximan, qui voit dans ce recul un changement des mentalités. «Il y a moins d’enthousiasme, c’est vrai, mais je pense que ce sont les temps qui ont changé.
Les priorités ne sont plus les mêmes, surtout chez les jeunes, qui ne perçoivent plus cette fête avec le même attachement qu’avant», observe-t-il. Rachidi Ibrahim, quant à lui, nuance cette lecture en évoquant les difficultés économiques que traverse le pays. « Il ne faut pas oublier que la crise frappe durement les familles. Beaucoup n’ont pas les moyens de célébrer comme ils le souhaiteraient, à cause de la vie chère. Ce n’est pas un désintérêt, c’est une réalité économique », fait-il valoir. En dépit des défis économiques et de l’évolution des mentalités, l’Aïd el-Kabir continue de porter en elle les valeurs fondamentales de l’islam : le sacrifice, la foi, la solidarité et le partage. À Moroni, comme partout ailleurs, cette journée a rappelé que, malgré les épreuves, la fraternité demeure au cœur de l’identité comorienne.