Ira, ira pas? L’opposition met l’opinion en haleine après quatre mois d’intenses discussions au sujet de sa participation ou non au dialogue prôné par le chef de l’Etat, Azali Assoumani et encouragé par l’Union africaine. A ce jour, la méfiance reste toujours vive dans les rangs des mouvements opposés au pouvoir. «Nous ne faisons pas confiance à ceux qui appellent à ce dialogue», a déclaré hier mardi 30 novembre, le secrétaire général du Front commun, Hassane Ahmed El-Barwane.
Un problème de clarté
Une position ravivée, il y a deux semaines, en marge d’un séminaire organisé, du 12 au 14 novembre, à Djwaezi à Mwali. L’ancien gouverneur de Ngazidja dit rester sur ses gardes. «Il y a un problème de confiance, il faut d’abord de la confiance avant toute chose», devait souligner Mouigni Baraka Said Soilihi.
Alors que certains responsables se trouvaient à Djoiezi, d’autres, à Moroni et l’extérieur du pays, ils se sont alignés à contrecœur aux recommandations du séminaire.
Les responsables de l’opposition ne voient pas le dialogue de la même manière.Des incompréhensions ont été rendues publiquesaprès le séminaire de Djwaezi. L’ancien ministre, Mohamed Larifou Oukacha, parle de «désaccords» sur la conduite à tenir face à l’appel au dialogue. Au cours d’une conférence de presse à Moroni sur les évènements de Ndzauze, le porte-parole du Front commun, Ibrahim Abdourazakou (Razida), hésitait à reconnaitre la réunion de Djwaezi et à accorder un crédit à ses conclusions.
Il a fallu l’intervention prompte de l’ancien ministre Mohamed Abdou Soimadou pour éviter un couac qui aurait montré les antagonismes profonds qui minent la cohérence de la parole officielle de l’opposition. Mouigni Baraka Said Soilihi essaie tant bien que mal de concilier les positions pour une démarche consensuelle de l’opposition. «Il y va de la crédibilité de notre combat», dit-il.
En clair, les dirigeants des mouvements politiques et personnalités proches et alliés de l’opposition ne parviennent pas à mettre de la clarté dans leur discours. En cinq mois, la principale structure, le Front commun des forces vives, joue la carte de la fermeté tout en laissant grande ouverte la porte menant à la table des discussions.
Le discours de l’opposition a, ainsi, beaucoup évolué au gré des évènements, surtout au lendemain de la publication du communiqué de l’Union africaine, appelant toutes les parties prenantes à un dialogue inclusif. Le message adressé, le 1er novembre dernier, à tous les acteurs politiques comoriens a poussé les chefs des partis opposés au régime à revoir la copie de leur discours et à faire un travail d’introspection pour arrêter des stratégies millimétrées, guidées par la réalité et les rapports de force en présence.
Révision de position
Après avoir rejeté catégoriquement l’idée même d’un dialogue national, l’opposition révisera cette position en exigeant des préalables au premier rang desquelles la libération «des prisonniers politiques». Un point de friction qui alimente toujours les malentendus puisque, pour le pouvoir, «il y a aucun prisonnier politique» aux Comores «mais des personnes poursuivies dans le cadre des délits de droit commun».
A entendre ses déclarations, l’opposition veut désormais des gages politiques pour apaiser les tensions larvées et faciliter la tenue d’un dialogue dans une atmosphère décontractée, seule condition, selon elle, pour donner un sens à un dialogue inter-comorien. A Mwali, les responsables présents ont, à l’issue de «l’Appel de Dwaezi», exigé cette fois, «une autorité neutre» pour diriger le dialogue. Des positions encore révisées mais compliquées surtout par l’existence de nombreux pôles de décisions dans les rangs de l’opposition.
Aujourd’hui, la libération des «prisonniers politiques» n’est pas en tête des préalables bien qu’elle soit dans la tête des radicaux de l’opposition. Pour certains, l’enjeu réside dans l’ordre des préalables au dialogue et les gages à poser pour décrisper la situation sans quoi cela risque de diviser l’opposition, retarder sa prise de position définitive et compromettre la sérénité de l’agenda du dialogue dont les conclusions sont attendues avant le mois de ramadan.
A.S. Kemba