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AprĂšs lâindĂ©pendance des Comores, en 1975, câest avec lui et Ă dâautres collĂšgues quâincombera la lourde tĂąche de mettre sur pieds le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres. âCâest nous qui avions crĂ©Ă© ce ministĂšreâ. Il sâagissait alors de feu Abbas Djoussouf, dâAli Toihir et dâAhmed Thabit, notre interlocuteur.
Il rappelle quâĂ lâĂ©poque dâAli Swalihi Mtsashiwa, dans tous les ministĂšres, il y avait deux ministres, appelĂ©s âdĂ©lĂ©guĂ©sâ. âAbbas Djoussouf et Ali Toihir Ă©taient les deux dĂ©lĂ©guĂ©s au ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres et moi jâen Ă©tais le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ralâ. A ce titre, reprend-il,
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jâĂ©tais prĂ©sent quand les Comores ont Ă©tĂ© admises aux Nations unies, le 12 novembre 1975 avec son excellence Mohamed Djaffar. Cette annĂ©e, nous nâavions prĂ©sentĂ© aucune rĂ©solution des Comores, Ă part celle qui a Ă©tĂ© parrainĂ©e par lâOrganisation de lâUnion africaine sur lâadmission des Comores aux Nations unies et adoptĂ©e presque par tous les pays du monde.
Mais avant de poursuivre, Ahmed Thabit fait un petit saut dans le temps. Il se remĂ©more lâattitude française aprĂšs la proclamation unilatĂ©rale de lâindĂ©pendance.
âLa France avait retirĂ© tout son personnel et croyez moi, le pays Ă©tait paralysĂ©. Elle a fait aux Comores, ce quâelle avait fait en 1958 en GuinĂ©e. Du jour au lendemain, le pays sâest retrouvĂ© avec un hĂŽpital presque fermĂ© parce que sans mĂ©decins, le lycĂ©e SaĂŻd Mohamed Cheikh nâavait pas de professeurs, idem pour la poste, et nous devions impĂ©rativement faire quelque choseâ.
âLa 31/4 du 21 octobre 1976â
Câest ainsi quâune dĂ©lĂ©gation, dirigĂ©e par Mouzaoir Abdallah et Ali Mlamali qui Ă©tait dĂ©lĂ©guĂ© Ă lâEducation et Ahmed Thabit en tant que secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Affaires Ă©trangĂšres, a sillonnĂ© toute lâAfrique. âIl nous fallait une assistance technique, il nous fallait des mĂ©decins, des professeurs, des techniciens de divers domainesâ, sâest-il souvenu.
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ParallĂšlement Ă celle partie sillonner lâAfrique, une autre dĂ©lĂ©gation sâest rendue en Europe. âA lâĂ©poque, nous pensions quâaucun pays europĂ©en occidental nâĂ©tait disposĂ© Ă aider les Comores, parce que nous savions que la France menait une campagne fĂ©roce pour que le pays soit isolĂ© et âpuniââ.Â
Heureusement, ajoutera-t-il, âavec notre diplomatie naissante nous avons pu trouver des mĂ©decins italiens, des agronomes belgesâ. Pour ce qui est du continent africain, les Comores ont pu avoir des professeurs sĂ©nĂ©galais, guinĂ©ens, etc.
âCâest lĂ que nous avons commencĂ© Ă faire valoir la diplomatie comorienne naissante, cette premiĂšre victoire nous a encouragĂ©s Ă aller de lâavantâ, se souvient-il, fier encore de la bataille remportĂ©e. Un joli pied-de-nez Ă la France.
La diplomatie se jouera aussi et surtout aux Nations unies. En 1976, les Comores ont prĂ©sentĂ© une rĂ©solution trĂšs importante qui devrait ĂȘtre connue par tous les Comoriens, celle portant le numĂ©ro 31/4 du 21 octobre de la mĂȘme annĂ©e.
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Cette rĂ©solution condamne les rĂ©fĂ©rendums du 08 fĂ©vrier et du 11 avril 1976 organisĂ©e dans lâĂźle comorienne de Mayotte et lâAssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale la considĂšre comme nulle et non avenue. Elle rejette toute autre forme de rĂ©fĂ©rendum ou consultation qui pourrait ĂȘtre organisĂ©e ultĂ©rieurement en territoire comorien de Mayotte ; elle condamne toute lĂ©gislation Ă©trangĂšre tendant Ă lĂ©galiser une quelconque prĂ©sence coloniale française en territoire comorien ; condamne Ă©nergiquement la prĂ©sence française Ă Mayotte qui constitue aux yeux des Nations Unies, une violation de lâUnitĂ© nationale, de lâintĂ©gritĂ© territoriale et la souverainetĂ© de la RĂ©publique indĂ©pendante des Comoresâ. Â
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Elle a Ă©tĂ© adoptĂ©e par plus de 127 voix, 27 abstentions et une voix contre qui Ă©tait la France. Il sâagit de la principale rĂ©solution Ă partir de laquelle se rĂ©fĂ©reront toutes les autres.
La France, trĂšs atteinte par cette rĂ©solution qui lâa condamnĂ©e, essaiera de faire obstacle Ă toute autre rĂ©solution allant dans ce sens. Aujourdâhui, on peut dire sans risque de nous tromper quâelle y est parvenue. Pour combien de temps encore?
Le combat continue
Et câest lĂ que la diplomatie comorienne, loin de se reposer sur ses lauriers, commence une campagne dâenvergure pour attirer mĂȘme des pays europĂ©ens dans son camp. Nous sommes en 1977. âCâest ainsi que nous sommes allĂ©s voir tous les pays europĂ©ens, ce nâĂ©tait pas encore lâUnion europĂ©enne mais le MarchĂ© communâ.
Il faut savoir que durant la session des Nations unies, tous les blocs rĂ©gionaux tenaient des rĂ©unions en vue de prĂ©parer leurs positions sur toutes les questions qui allaient y ĂȘtre dĂ©battues. La dĂ©lĂ©gation comorienne a commencĂ© par voir le prĂ©sident du groupe europĂ©en, le Royaume uni, au mois de novembre, toujours en 1977.
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AprĂšs avoir expliquĂ© Ă lâambassadeur notre combat pour le retour de Mayotte, celui-ci a tenu Ă nous dire que tous les pays du MarchĂ© commun Ă©taient conscients que Mayotte Ă©tait comorienne mais quâils ne pouvaient pas voter en faveur dâune rĂ©solution qui condamnait un des leurs. Et par consĂ©quent, il nous a conseillĂ©s dâaller voir les pays nordiques qui nâĂ©taient liĂ©s par une convention quelconque.
La dĂ©lĂ©gation comorienne est donc partie voir les pays nordiques. RĂ©sultat des courses : pendant le vote de la rĂ©solution, la NorvĂšge et lâIslande avaient votĂ© en notre faveur. Petit pays deviendra grand.
La France nâallait par tarder Ă rĂ©agir. Effectivement, quand celle-ci a vu que la dĂ©lĂ©gation comorienne a commencĂ© son jeu de sĂ©duction envers diverses dĂ©lĂ©gations, certaines europĂ©ennes de surcroit, elle a demandĂ© Ă voir les Comoriens par la voix de son ambassadeur aux Nations unies. Le diplomate voulait discuter du projet de rĂ©solution que les Comoriens sâapprĂȘtaient Ă prĂ©senter Ă lâassemblĂ©e gĂ©nĂ©rale.
âCompromisâ mais pas âcompromissionâ
Le chef de la dĂ©lĂ©gation, Mouzaoir Abdallah, a dĂ©signĂ© trois personnes. Il sâagissait de Charles Guy, dâAli Hassanaly et dâAhmed Thabit. La France de son cĂŽtĂ© dĂ©lĂ©guera, Ă©galement, trois personnes.
Lâancien ambassadeur des Comores en Afrique du sud tiendra Ă prĂ©ciser â et cela a tout son importance surtout aujourdâhui : âNous Ă©tions assis dâĂ©gal Ă Ă©galâ. Pays souverain contre pays souverain. âNous leur avons prĂ©sentĂ© notre projet de rĂ©solutionâ.
Le pays de Charles de Gaulle voulait, vous devez vous en douter, Ă tout prix Ă©viter une condamnation, lâopprobre. Toute la discussion a tournĂ© autour de ça : Eviter une condamnation, surtout Ă©manant dâun petit pays de lâOcĂ©an indien pour la si puissante France.
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Les Comoriens demanderont abruptement : âsi nous faisons ce que vous nous demandez, quâaurons-nous en Ă©change?â. Avec le culot qui caractĂ©risait le rĂ©gime de lâĂ©poque, les valeureux Comoriens ajouteront mĂȘme, un tantinet perfides : ânous allons vous demander de voter pour notre rĂ©solutionâ.
 Le Français a manquĂ© de sâĂ©touffer ou presque. âCe nâest pas possible, ce que vous me demandez, sâest-il Ă©tranglĂ©, nous serions, si nous le faisions, rappelĂ©s dans la foulĂ©eâ. Il fallait trouver un consensus, un compromis. Un compromis mais pas une compromissionâŠ
Le compromis qui fut trouvĂ© est celui ici : âne pas condamner la France nommĂ©ment, mais nous avons dĂ©cidĂ© de reconfirmer, et câest lĂ que nous avons sorti la carte de la diplomatie, dans le prĂ©ambule de la rĂ©solution, prĂ©cisĂ©ment au niveau des considĂ©rants, qui se rĂ©fĂšre Ă la rĂ©solution 31/4, celle-lĂ Â mĂȘme qui reconnaissait lâappartenance de Mayotte Ă lâensemble comorien, et qui demandait Ă la France dâentrer en nĂ©gociation avec nous pour sa rĂ©intĂ©grationâ.
En remĂ©morant cette scĂšne, le diplomate, plus quarante annĂ©es aprĂšs, ne peut cacher sa fiertĂ©. âNous nâavons pas condamnĂ© nommĂ©ment la France mais le prĂ©ambule, si, puisque sâĂ©tant rĂ©fĂ©rĂ© Ă la rĂ©solution 31/4â, sâest-il exclamĂ©.
ZĂ©ro contre et, seulement, 20 abstentions !
Continuant sur cette lancĂ©e, la dĂ©lĂ©gation comorienne a demandĂ© Ă la France de ne pas participer au vote et a poursuivi son offensive diplomatique avec dâautres pays. Les non-alignĂ©s, tous les pays africains Ă©taient du cĂŽtĂ© des Comores, les pays arabes, tous les blocs rĂ©gionaux ont Ă©tĂ©, Ă©galement, sollicitĂ©s.
Lâoffensive finira par payer. Le droit est lâarme des faibles. âAu moment du vote, il y aura une vingtaine dâabstentions, et zĂ©ro contreâ, a expliquĂ© notre interlocuteur. Jubilant encore, il prĂ©cisera : âcâest la premiĂšre fois dans les annales des Nations unies pour les rĂ©solutions concernant Mayotte que nous nâavons pas eu de voix contreâ.
La diplomatie comorienne a Ă©tĂ© quasi unanimement saluĂ©e et cĂ©lĂ©brĂ©e partout sur le continent africain. âUn succĂšs Ă©crasantâ, martela-t-il. En effet.
Extrait de la résolution A/RES/49/18 du 06 décembre 1994
La derniĂšre rĂ©solution comorienne aux Nations unies remonte Ă 1994, sous la prĂ©sidence de SaĂŻd Mohamed Djohar, cela fait plus de vint-trois ans. Depuis, notre diplomatie tombe de Charybde en Scylla. Le 6 dĂ©cembre 1994, fut adoptĂ©e la derniĂšre rĂ©solution concernant lâĂźle comorienne de Mayotte. Entre temps, Mayotte sâest encore plus Ă©loignĂ©e. Il y a eu le rĂ©fĂ©rendum de dĂ©partementalisation effectuĂ© en mars 2009 sans que les Comores saisissent le Conseil de sĂ©curitĂ©. Extrait de la rĂ©solution A/RES/49/18 du 06 dĂ©cembre 1994 :
- âRappelant en outre que, conformĂ©ment aux accords signĂ©s le 15 juin 1973 entre les Comores et la France, relatifs Ă lâaccession des Comores Ă lâindĂ©pendance, les rĂ©sultats du rĂ©fĂ©rendum du 22 dĂ©cembre 1974 devaient ĂȘtre considĂ©rĂ©s sur une base globale et non Ăźle par Ăźle,
- Convaincue quâune solution juste et durable de la question de Mayotte rĂ©side dans le respect de la souverainetĂ©, de lâunitĂ© et de lâintĂ©gritĂ© territoriale de lâarchipel des Comores,
- Convaincue Ă©galement quâune solution rapide du problĂšme est indispensable pour la prĂ©servation de la paix et de la sĂ©curitĂ© qui prĂ©valent dans la rĂ©gion,
- Ayant Ă lâesprit la volontĂ© exprimĂ©e par le PrĂ©sident de la RĂ©publique française de rechercher activement une solution juste Ă ce problĂšme,
- Prenant note de la volontĂ© rĂ©itĂ©rĂ©e du Gouvernement comorien dâengager dans les meilleurs dĂ©lais un dialogue franc et sĂ©rieux avec le Gouvernement français en vue dâaccĂ©lĂ©rer le retour de lâĂźle comorienne de Mayotte au sein de la RĂ©publique fĂ©dĂ©rale islamique des Comores,
- Prenant acte du rapport du Secrétaire général, en date du 28 octobre 1994 1/,
- Ayant Ă©galement Ă lâesprit les dĂ©cisions de lâOrganisation de lâunitĂ© africaine, du Mouvement des pays non alignĂ©s et de lâOrganisation de la ConfĂ©rence islamique sur cette question,
1.   RĂ©affirme la souverainetĂ© de la RĂ©publique fĂ©dĂ©rale islamique des Comores sur lâĂźle de Mayotte;
2.   Invite le Gouvernement français Ă respecter les engagements pris Ă la veille du rĂ©fĂ©rendum dâautodĂ©termination de lâarchipel des Comores du 22 dĂ©cembre 1974 pour le respect de lâunitĂ© et de lâintĂ©gritĂ© territoriale des Comores.
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