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Le premier journal des Comores

Les vieux démons sont de retour

Les vieux démons sont de retour

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Ce pays a eu son indépendance le 6 juillet 1975, après des années d’un jeu de cache-cache entre les Pères de l’Indépendance et les autorités de l’ancienne puissance coloniale. Un jeu dans lequel, l’équipe d’indépendantistes d’Ahmed Abdallah est sortie victorieuse, avec la seule indépendance unilatérale de l’Afrique, après celle de la Guinée de l’emblématique et charismatique Sékou Touré qui a tenu tête au Général de Gaulle, il y a exactement 60 ans. Hélas, 28 jours seulement après l’autodétermination de cet archipel aux parfums, la sanction de nos ancêtres les gaulois n’a pas tardé à venir. Le premier coup d’Etat des Comores a donc été réalisé, avec moins de 10 fusils, par quelques Comoriens bien visibles, une grosse organisation logistique invisible à des milliers de kilomètres et une base arrière dans une île voisine, pour répondre à l’impertinence de ces «petits nègres indigènes» sous les cocotiers.


Le volcan, cette force de la nature a fait nos îles et nous avons choisi d’en faire un peuple, une nation et une patrie. Mais notre principal problème est qu’il y a un volcan encore plus puissant que le Karthala, c’est ce que j’appelle «insularisme» comorien. Et je me demande si le Comorien aime réellement les Comores, quand je vois avec quel talent, il s’évertue à continuer le travail d’implosion du Karthala, sous la pression d’une main invisible. Aucune puissance étrangère, aucun service de renseignements, aucun commandement d’opérations spéciales, aucun groupuscule de barbouzes n’aurait pu importer ces démons de la déstabilisation dans ce pays en construction, si le Comorien n’avait pas été si manipulable et si bien instrumentalisé, au point de trouver l’idée géniale et l’exécuter, telle une marionnette, dans un schéma d’autodafé qui fait froid dans le dos.


L’accord de Fomboni a tous les défauts du monde, même si par une formidable hypocrisie, on lui attribue des qualités qui sont loin de l’esprit de ses rédacteurs. Mais ce document conjoncturel avait réussi cet extraordinaire exploit de créer de la stabilité dans notre pays, en mettant fin à la longue série de coups d’Etats et en nous faisant oublier cette horrible réputation d’un pays appartenant à Moustoifa Mhadjou. Il a rendu la culture dogmatique du séparatisme politique plus silencieuse mais toujours pesante. Et aujourd’hui ces deux maux qui ont ruiné des années d’efforts de construction, sont fusionnés pour venir démolir nos velléités d’indépendance économique et la lutte inédite contre la balkanisation des Comores, dans un silence assourdissant des pseudo-nationalistes. La différence aujourd’hui est que la main invisible n’a plus les capacités stratégiques et tactiques que dans le passé. Son amateurisme, additionné à la naïveté et à l’incompétence de ses marionnettes comoriennes multiplient les échecs des tentatives de déstabilisation orchestrées toujours sur la même base arrière, mais aussi parce que le comorien n’est plus crédule.


Le cœur saigne, on pleure des larmes de sang lorsque les rêves et l’espoir d’un pays veulent être brisés par ses porteurs d’espérance. Ces enfants qui au travers de leurs formations et voyages dans des contrées lointaines ont vu ce qu’il y a de meilleur et ont choisi le pire pour leur pays.


Certes, l’accord de Fomboni a acté la réconciliation des Comoriens. Mais pour un patriote attaché aux grands principes philosophiques et politiques de l’Etat-Nation, aujourd’hui ses défauts pèsent plus que ses qualités. L’idée de Nation y était proscrite astucieusement, et la confédération y était inscrite d’une encre translucide.
Contrairement à ce qu’a toujours voulu nous faire croire la main invisible, ce pays dans son fondement est uni et unitaire, parce que les Comoriens partagent la même histoire, le même espace géographique, la même langue, la même religion, la même culture, les mêmes coutumes, les mêmes valeurs et le même sang. Des pays, sont des pays avec moins que ça. J’en connais, y compris en Europe où les dialectes du Nord ne sont pas compris par les habitants du Sud, où les coutumes de l’Est sont considérées comme archaïques par ceux de l’Ouest et pourtant ils sont sous la même bannière. Des pays ont  eu recours à la force et à la violence pour imposer une unité linguistique et pouvoir se comprendre.


Avec leur tintamarre, ils m’ont amusé, ceux qui ont donné la paternité de la tournante et ses attributs à l’accord de Fomboni, preuve éclatante qu’ils ne l’ont même pas lu, puisqu’il n’en a jamais été question. Mais je dois dire que l’idée de la tournante pour les présidentielles, cette discrimination positive à la comorienne, est une bonne chose en soi, dans ce pays où la notion de partage est enracinée dans la société d’une manière absolue. Nonobstant, il fallait la rendre plus démocratique et enlever cette pratique saugrenue, inédite dans le monde d’une minorité qui décide seule du destin de la majorité. Nous devions nous inspirer de toutes ces présidences tournantes à travers la planète qui respectent les principes de la démocratie. C’est comme si en France un simple autochtone du fin fond de la Corrèze a été choisi à la quasi-unanimité par les habitants d’un bourg de 500 âmes lors d’une primaire et puis se présente pour être choisi par 60 millions de français. Une absurdité totale, je vous l’accorde. Alors pourquoi ce qui est impossible ailleurs, doit être obligatoire ici ?


Mohamed Mbechezi
Conseiller en communication de
la présidence de l’Union des Comores

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