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SaĂŻd Hassan SaĂŻd Hachim a parlĂ©. Il sâest livrĂ© : "je libĂšre ma conscience", sâest Ă©criĂ© lâhomme qui fut 3 fois dĂ©putĂ©. SaĂŻd Hassan SaĂŻd Hachim sâest adressĂ© aux comoriens, hier lors dâun entretien accordĂ© Ă votre journal. Le vieil homme nâa rien perdu de sa verve. Il a attendu la veille du jour du lancement de la campagne rĂ©fĂ©rendaire pour sâexprimer et faire part de sa prĂ©occupation profonde. "Ce qui se passe actuellement dans notre pays nĂ©cessite les efforts de chaque comorien rĂ©sidant ici ou Ă lâĂ©tranger", a-t-il dâemblĂ©e lancĂ©. "Il est temps que chaque comorien paie sa dette envers son pays au vu de ce qui sây passe", va-t-il poursuivre.Â
Lâancien ambassadeur, fera dâabord un saut dans le passĂ©. Il est longuement revenu sur les anciens leaders, SaĂŻd Mohamed Cheikh, le Prince SaĂŻd Ibrahim, Ahmed Abdallah Abderemane et Mohamed Ahmed, et lâencadrement qui a Ă©tĂ© le leur pour les hommes de sa gĂ©nĂ©ration, dĂšs 1962 et ce, au niveau des quatre Ăźles. De Bamana Ă Marcel Henry, de Mikidache Ă Ahmed Abdou, de Mattoir Ahmed Ă Ba Soilihi, de Ali Bazi Selim Ă Ali Mlahaili, par exemple. "Ils nous ont initiĂ©s Ă la politique afin que leur relĂšve puisse ĂȘtre assurĂ©e", a-t-il indiquĂ©.
"Je suis conscient que je suis lâun des derniers de ma gĂ©nĂ©ration, malheureusement ; et jâaffirme ici que je ne fais pas partie de ceux qui ont spoliĂ© ce pays". Il en profitera pour envoyer des piques aux jeunes loups aux dents particuliĂšrement longues qui sâenrichissent le temps que dure une fonction. "Jâavais le choix entre lâargent et lâhonneur et jâai choisi lâhonneur ; jâai toujours voulu reprĂ©senter mon pays en donnant le meilleur de moi-mĂȘme, Ă©ducation reçue de nos pĂšres spirituels".
A ce niveau, il sautera quelques annĂ©es encore et en viendra Ă la crise sĂ©paratiste des annĂ©es 1990. "Jâai Ă©crit aux Colonels Abeid et Azali Assoumani, jâai demandĂ© aux militaires quâils Ă©taient, de mettre tout en Ćuvre pour prĂ©server la paix et lâUnitĂ© de notre pays", a-t-il rappelĂ©, les courriers envoyĂ©s aux deux hommes bien mis en Ă©vidence. Il dit avoir continuĂ© en interpellant les notables, le Grand Mufti, le regrettĂ©Â Grand cadi SaĂŻd Mohamed Djeylane ainsi que les divers acteurs toujours dans le but de promouvoir la cohĂ©sion nationale.Â
Tout cela pour en venir à la dette des comoriens envers leur nation, leur pays. "Lorsquâun comorien nait ici, son sang abreuve la terre comorienne et Ă ce titre, il a des droits et des devoirs envers elle". Il est temps de la payer "par de lâargent, par des efforts, par des rĂ©flexions".
A ce stade du rĂ©cit, lâancien ministre dâEtat a fait part de lâinquiĂ©tude qui est la sienne. "En 38 ans de carriĂšre politique, je nâai jamais entendu quelquâun dire que du sang sera versĂ©, quelle que soient les rivalitĂ©s qui pouvaient opposer les uns aux autres". Il fait ainsi rĂ©fĂ©rence Ă certains hommes politiques, des deux bords qui en cette pĂ©riode trĂšs passionnĂ©e oĂč lâactualitĂ© politique domine tout le reste, osent tenir des propos, pour le moins, sanglantsâŠ
"Aussi, les mots que jâai entendus Ă trois reprises, portĂ©s par des comoriens, parlant de sang, de mort mâinquiĂštent au plus haut point ; celui qui mâa sans doute le plus choquĂ© a dit âque notre sang serait de lâencre, et les armes nos stylos pour Ă©crire lâhistoire de ce paysâ ", regrette lâancien ministre.Â
 Jâinterpelle ainsi le prĂ©sident de la RĂ©publique, les gouverneurs Hassani Hamadi, Salami Abdou Salami, Mohamed Fazul et le vice-prĂ©sident Djaffar SaĂŻd Hassani, et je leur dis que les Ă©lus doivent dans leurs dĂ©cisions, prendre en compte lâavis de la majoritĂ© ; vous qui ĂȘtes aux affaires, vous qui ĂȘtes dans lâopposition, il est temps de promouvoir le dialogue, le consensus afin de ne pas mettre en pĂ©ril lâavenir de nos enfants".
Et de citer aussi les patriarches que comptait le pays, qui ont toujours mis en avant la rĂ©conciliation des cĆurs, peu importe la rivalitĂ©, et tout se rĂ©solvait par une priĂšre dans les zawiyas.
Lâancien gouverneur interpellera directement le Mufti, SaĂŻd Toihir Ben SaĂŻd Ahmed Maoulana, ainsi que tous les ulĂ©mas. "Vous qui ĂȘtes les hĂ©ritiers du message prophĂ©tique, un message de paix et de concorde, comment pouvez-vous vous taire alors que le pays est au bord de la catastrophe", a-t-il clamĂ©. "Voici venu le temps oĂč chaque musulman doit se rĂ©concilier avec un musulman comme lui et vous devez, vous les Ulemas, faire en sorte que cessent les querelles, les divisions profondes entre les hommes politiques, câest lâavenir du pays, encore une fois, qui est en jeu".
Il interpelle de nouveau Azali Assoumani, Djaffar, Salami, Fazul et Hassan Hamadi et les autres : "nâĂ©coutez aucun conseiller qui vous demandera de camper sur vos positions, car en rĂ©alitĂ©, celui qui vous demande dâagir de la sorte est votre ennemi; entamez des discussions, promouvez la concorde, la concertation".
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A 86 ans, lâancien ambassadeur des Comores en France, citant tour Ă tour Machiavel, Abraham Lincoln, le GĂ©nĂ©ral de Gaulle, etc., pour illustrer la situation qui prĂ©vaut, a dĂ©cidĂ© de libĂ©rer sa conscience, de livrer le fond de sa pensĂ©e. Une pensĂ©e entiĂšrement tournĂ©e vers lâUnitĂ© nationale, la concorde et surtout le dialogue.
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En cette pĂ©riode charniĂšre, oĂč de part et dâautre, les tensions sont exacerbĂ©es chaque jour un peu plus, la sortie de SaĂŻd Hassan SaĂŻd Hachim reste remarquĂ©e et remarquable. Celui-ci a insistĂ© encore et encore sur la dette quâont les enfants de ce pays envers leur pays. Cette dette, Ă lâen croire, ne peut se payer par le sang. Intraitable, il scandera : "de la discussion, jaillit la lumiĂšre". Ainsi parlait SaĂŻd Hassan SaĂŻd Hachim, tribun Ă 30 ans, tribun Ă 86 ans, avec lâamour du pays, au cĆur. Toujours.
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