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Muet depuis plusieurs mois, malgré les bonnes occasions, l’ancien candidat à la dernière élection présidentielle, Fahmi Said Ibrahim, a brisé le silence hier, mercredi 17 octobre, à travers une conférence de presse qu’il a animée dans son cabinet devant un parterre de journalistes. Il était question, tout d’abord, actualité oblige, des derniers évènements à Ndzuani. Selon ses propos, il s’agit d’une situation qui compromet la stabilité du pays, «une stabilité acquise depuis plusieurs années». «Devant cet état de fait, les autorités de l’Union et des îles et l’opposition doivent amorcer un dialogue de haut niveau devant permettre de garantir la paix. Le gouvernement doit faire preuve de retenue et l’opposition doit regagner la table des discussions», indiquera-t-il non sans regretter les pertes en vies humaines et les blessés.
L’ancien ministre de la Justice se dit en phase avec ceux qui défendent les libertés fondamentales, dont certains membres aussi bien de l’opposition que du pouvoir. S’il reconnaît ne pas connaitre les tenants et les aboutissants de la situation de Ndzuani, le conférencier estime tout de même, pour répondre aux questions des journalistes, qu’il existe «un sentiment de frustration à Ndzuani et à Mwali, le même sentiment que Ngazidja a eu lorsqu’il a fallu défendre la tournante en 2016. Je ne peux pas avancer que cette situation est due à celle de l’ancien président Sambi ou à la perspective qu’il y ait du pétrole et du gaz dans le pays. Toujours est-il que les enjeux économiques sont souvent susceptibles d’alimenter les affrontements». Il marquera son étonnement de constater «la rapidité avec laquelle réagit le ministre de l’Intérieur. Il y a une présomption d’innocence et pour cela, seule la Justice permettrait de situer les responsabilités et non que le ministre accuse certains dès le début». L’autre point saillant de cette conférence concernait l’adoption de la nouvelle Constitution désormais en vigueur. Pour celui qui se réclame du parti Juwa et donc de l’opposition, l’idée de réviser la constitution était en soit légitime «en ce sens qu’il y avait des incohérences». «La tournante doit être revue ou tout simplement supprimée en ce qui concerne ma position. Toutefois, il aurait été opportun d’attendre la fin du second cycle de la tournante avant d’apporter des modifications ou la supprimer tout bonnement. Tous nos partenaires se réfèrent aux accords de Fomboni. Si je trouve que la révision constitutionnelle est fondée et que la tournante ne favorise pas le sentiment d’appartenance à une nation, il aurait tout de même fallu prendre en compte la dimension politique avant de revoir le texte fondamental», a éclairé Fahmi Saïd Ibrahim.
Revenant sur la question de l’ancien président Sambi, aujourd’hui en détention dans sa résidence de Vwadju, l’ancien député d’Itsandra-Sud affirmera avec conviction que «Sambi n’a pas détourné» l’argent de la citoyenneté économique. Il veut toutefois que l’instruction du juge continue pour que «les Comoriens, et c’est leur droit, sachent ce qui s’est passé avec cet argent». «Dans ce dossier, il ne faudrait pas qu’il y ait deux poids deux mesures. L’ancien président Sambi devrait bénéficier des mêmes mesures que l’autre ancien président aujourd’hui libre de ses mouvements. Je rappelle que la détention est faite pour les personnes susceptibles de ne pas répondre aux convocations du juge. Or, Sambi était à l’extérieur et il est venu pour répondre à la Justice. Il faut une égalité de tout le monde devant la loi d’autant plus que le programme de la citoyenneté économique a été exécuté seulement deux ans lors du mandat de Sambi contrairement aux cinq ans, de son successeur», détaillera le conférencier.
Quant à la prescription soulevée par le bâtonnier des Avocats, Ibrahim Ali Mzimba, Fahmi Saïd Ibrahim trouve qu’elle est valable pour le cas de l’ancien député Sidi, aujourd’hui en prison. «La prescription implique un acte matériel posé comme ce fut le cas de Sidi accusé de forfaiture pour avoir remplacé le président de l’Assemblée pour l’adoption d’une loi controversée mais validée par la Cour constitutionnelle. L’acte est réalisé et un certain temps est passé par conséquent, il y a prescription. En ce qui concerne Sambi, l’acte même n’est pas posé et la procédure est en cours. Soulever le principe de la prescription reviendrait à accepter que l’acte a été commis. Pourtant ce n’est pas le cas. Sambi doit avoir la possibilité de se défendre. J’en profite pour apporter mon soutien à son avocat qui dénonce des pratiques qu’aucun autre avocat n’accepterait», témoignera avec insistance l’ancien ministre. D’autres sujets sont évoqués, notamment les élections présidentielles ou le bras de fer entre l’Union et les exécutifs insulaires. À ce dernier sujet, Fahmi Saïd Ibrahim, compte tenu du dernier avis de la Cour suprême, trouve qu’en l’absence d’une loi qui abroge celles existantes, «les commissaires doivent continuer à expédier les affaires courantes».