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On est à un mois et dix jours de l’élection référendaire. Pourtant le projet de révision de la Constitution se fait toujours désirer. Peut-on savoir pour quelles raisons ?
Les gens partent rapidement en besogne. Pour un tel projet, il est tout à fait indiqué de sortir au préalable les grandes lignes, les articles qui sont appelés à subir des modifications probablement profondes pour que tous les Comoriens comprennent de quoi il s’agit. Raison pour laquelle l’on a sorti le livre de suivi et des recommandations des Assises. L’objectif était d’expliquer aux Comoriens et ainsi procéder à certaines améliorations et autres rectifications avant de sortir le projet détaillé en long et en large. Les choses sont pratiquement prêtes et le texte devrait être disponible probablement à la fin de cette semaine. L’on ne doit pas oublier qu’il y a eu des périodes lors desquelles, l’on votait sans pour autant que l’on sache de quoi il s’agissait.
Les critiques n’ont jamais été aussi nourries que dernièrement et le nœud du problème semble être la Cour constitutionnelle. Comprenez-vous la fixation sur cette instance dont les compétences sont transférées à la Cour suprême ?
Cette fixation démontre l’insuffisance, l’absence d’argumentaire et le machiavélisme sans oublier le manque d’audace du côté de l’opposition. Le débat sur la Cour constitutionnelle n’est rien d’autre qu’une question politico-constitutionnelle. En revanche, les réformes constitutionnelles concernent la vie de tous les Comoriens. L’on comprend que l’opposition n’a que faire de la vie quotidienne des Comoriens.
Les pays Arabes ont eu leur printemps mais les Comoriens ont choisi de s’asseoir et de tirer les leçons du passé pour amorcer l’avenir. Il faut donc de l’audace et du courage politique pour engager des réformes. Que n’a-t-on pas dit sur la Cour constitutionnelle, celle qui aurait pu basculer le pays dans une guerre civile, celle qui a vu un de ses membres parler de corruption, de détournements et compromis politiciens. Une cour dont la composition était complètement fallacieuse. En l’absence d’arguments de fond, l’opposition s’accroche à cette question.
Vous estimez donc qu’un changement de Constitution s’impose et quels en sont les arguments ?
Les Comoriens veulent une présence solide de l’Etat sur l’ensemble du territoire, un Etat moins budgétivore en supprimant entre autres les vice-présidents et les conseillers, unifier l’administration et donner la chance au président de compléter son projet. Contrairement à la révision constitutionnelle de 2009, celle-ci est pragmatique et prend en compte seulement les besoins de la population. Population qui y est associée. Le président de la République va démissionner et postuler pour la seconde phase de la tournante, celle qui permettra à Ngazidja de gouverner pour deux mandats et ainsi de suite.
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L’autre actualité du moment concerne la dernière sortie du vice-président en charge de l’Economie. Quels enseignements tirez-vous de son discours ?
Pour commencer, c’est un élu sous un ticket, soutenu dans une majorité, il doit par conséquent rendre des comptes au membre du gouvernement lorsqu’il se désolidarise. Ensuite, par sa relation et sa proximité avec le président, il y a également des comptes à rendre quand on est intimement lié à un homme qui va jusqu’à faire de vous son vice-président. S’agissant maintenant de sa responsabilité, une telle sortie signifie que l’on a fait le tour et décidé de tirer les leçons. On ne peut pas avoir un pied dedans et un autre dehors. On a l’obligation de protéger l’Etat et pourtant ce discours met ce dernier en difficulté. Cette position dérange le fonctionnement de l’Etat et dans pareille situation intenable, l’on tire les conséquences.
Vous faites donc allusion à une démission…
A sa place, j’aurais démissionné avant d’expliquer les raisons. On ne peut pas parler de dictature et de restriction des libertés tout en restant en place. Il y a des dispositions à prendre même si je ne sais pas lesquelles. Toutefois, si le président décide de le sanctionner, il aura raison parce que comme je l’ai dit, cette position met en difficulté le gouvernement.
Quel impact présumez-vous de cette sortie par rapport au référendum à venir ?
Vous savez, le vice-président en charge de l’Economie est arrivé en politique directement avec le pouvoir. Je ne pense pas qu’il puisse peser bien lourd en termes d’électorat et d’ailleurs son parti semble être divisé. Certes, il n’avait rien dit publiquement, mais je rappelle qu’Idi Nadhoim était contre le référendum de Sambi en 2009. Pourtant, le résultat final n’a pas été impacté.
Des émissaires de l’Onu et de l’Ua viennent aux Comores justement dans le cadre de ce référendum…
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Ce sont deux institutions dont les Comores sont membres et qui ont des représentants sur place. Certainement, ils ont eu des rapports qui ont précipité l’arrivée de ces émissaires. Il faut savoir que certains vendent le côté moins reluisant de notre pays ailleurs. Ainsi, les émissaires viennent pour s’enquérir de la situation qui est somme toute simple. Les opposants sont dans leur droit de manifester et de toujours dire que rien ne va. Tout comme le président est dans son droit de prendre des décisions pour le bien-être des Comoriens.
Pour finir, parlons de votre position personnelle. Vous vous identifiez au parti Juwa, lequel se trouve dans l’opposition et vous au pouvoir. N’est-ce pas contradictoire ?
Je refuse d’aller dans l’opposition avec les personnes que j’ai battues hier puisque je rappelle que nous avons soutenu Azali Assoumani. Aujourd’hui, malheureusement au même titre que tous les autres partis, le Juwa a deux sections à savoir le Juwa démocratique que j’incarne et le Juwa… peut-être royaliste de Barwane. Ce dernier ainsi qu’Ibrahim Mohamed Soulé ont tout fait pour ramener le parti dans l’opposition, eux qui n’ont pas voté pour Azali Assoumani. Nous n’avons pas soutenu la position du parti par rapport à la décision du chef de l’Etat de rompre nos relations avec le Qatar. Aujourd’hui, la question est portée devant les juridictions mais en attendant, nous avons donc deux tendances.
Propos recueillis par
Mohamed Youssouf