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Ainsi, l’hégémonie des anciennes puissances coloniales est contestée et ces dernières perdent leurs pré-carrés jadis gardés jalousement. Dans ces anciennes colonies, ces sont les tensions et les conflits internes qui demeurent les obstacles majeurs empêchant les dirigeants de ces Etats de faire face aux pressions venant de l’extérieur.
Profitant de ces failles et faiblesses politiques, les anciennes puissances coloniales utilisent ces divisions pour maintenir encore une certaine influence. C’est le cas des Comores aujourd’hui qui ont pourtant toutes les cartes en main pour faire valoir leur droit de souveraineté nationale face à leur puissance coloniale.
Sur le plan extérieur
Les Comores ont la légitimité internationale sur l’ensemble du territoire national. Que ce soit auprès des Nations unies, de l’Union africaine, de l’Union européenne (que la France tente d’utiliser contre les Comores) ou des pays de la Ligue arabe ; que ce soit auprès des institutions financières et monétaires… les Comores ont toujours été considérées comme quatre îles. Donc, en dehors de la France aucune autre voix dissonante n’est contre les Comores. Cependant, il est regrettable de constater l’insuffisance des gouvernements successifs à constituer un lobbying international en faveur des Comores.
Le pot de terre contre le pot de fer
Certes, le rapport de force entre la France et les Comores est tellement inégal qu’il semble perdu d’avance. C’est un conflit politique qui oppose la France, 6ème puissance économique du monde contre les Comores, 198ème Pib du monde. Plus difficile encore, les Comores dépendent économiquement de la France ? C’est une “guerre de salive” opposant la 4ème puissance nucléaire mondiale à un pays armé de machettes.
Cependant, à en croire les mythes et légendes ou à la puissance de la justice, on peut penser au combat de David contre Goliath ou à cette maxime de Jean Jacques Rousseau : “le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme pas sa force en droit et l’obéissance en devoir”.
Plusieurs obstacles se dressent sur le chemin de l’unité nationale. D’abord le décrochage mahorais, qui est devenu le nœud du problème.
Comment comprendre la réaction des Mahorais face à ses frères et sœurs comoriens ? Ce n’est pas un combat idéologique qui est menée mais une haine profonde de l’autre qui se traduit par la sauvagerie des actes commis.
Une barbarie qui n’a pas sa place en démocratie ou dans une société avec des valeurs religieuses. Certes l’immigration sur l’île pose de sérieux problèmes à résoudre. Mais, la réaction des habitants cache mal l’idée qu’il ne s’agit pas d’une réaction à l’insécurité généralisée sur l’île mais à une chasse aux “Comoriens”. Car comment lutter contre des voleurs à l’arrachée et des coupeurs de routes en s’attaquant à des mères et enfants innocents ? Comment expliquer que des milices cagoulées pénètrent avec violence dans les maisons pour rafler des familles avec enfants et les livrer aux gendarmes ?
Dans certaines localités, des repérages et des listes de familles “originaires des Comores” à décaser sont faits depuis longtemps.
En mars, certaines de ces listes ont Ă©tĂ© rendues publiques quelques heures. Certains de ces actes illĂ©gaux sont faits en prĂ©sence des forces de l’ordre qui collaborent en affrĂ©tant des bus pour transporter ces dĂ©casĂ©s vers des centres de rĂ©tention avant expulsion.Ces pratiques font penser aux rafles des juifs. A Mayotte aucune autre communautĂ© de clandestins n’a Ă©tĂ© ciblĂ©e ni renvoyĂ©e dans son pays d’origine alors qu’elles sont toutes connues.Â
Ensuite, les divisions anciennes des acteurs politiques comoriens ne permettent pas de parler d’une seule voie pour une question qui dépasse les intérêts partisans et engage l’existence politique des Comores. Quelque soit le temps et les tendances politiques, il doit y avoir une position unique face à cet enjeu.
Enfin, malgré les déchirements actuels au sein de la classe politique et de la société comorienne, la décision du gouvernement de stopper les expulsions de Mayotte devrait avoir l’adhésion de tous. Car il s’agit d’une question qui dépasse le simple cadre politique avec des conséquences à la fois sociales, matérielles, humaines et morales.
Ainsi, le chantage aux visas et autres avantages matériels ne relève-t-il pas de considérations secondaires face à l’existence même du pays ? Puisque dans le monde d’aujourd’hui tout est calculé, que gagneront les Comores à céder à la pression d’en face et que perdront-ils à tenir leur position ?
Les déclarations de Hamada Mmadi Boléro à la Coi et celles, plus récentes, du ministre des affaires étrangères ont eu l’adhésion de tous. N’est-ce pas le moment pour le président de la République de s’adresser à son tour au peuple dans cette période d’inquiétudes ?
Mohamed Chanfi